Le Dépanneur au temps du coronavirus
(Le Progrès Saint-Affricain le jeudi 9 avril 2020)
Viala du Tarn
C’est le dernier commerce ouvert dans le village.
Un collectif de bénévoles s’est organisé pour le faire vivre.
La population vient y faire ses courses et y trouve du lien social.
Trois raisons de s’y intéresser.
Si Le Dépanneur n’existait pas, il faudrait l’inventer. C’est ce que doivent se dire nombre de Vialaraines et de Vialarains habitué-e-s de cette épicerie associative et autogérée. Et ce n’est pas une vue de l’esprit car presque tous les jours on les entend encourager les bénévoles qui tiennent les permanences par des « Heureusement que vous êtes là », « C’est super, ce que vous faites ! », « Je préfère faire mes courses ici »…
Le 2 janvier dernier, Le Dépanneur a pris la suite de Marie-O Cluzel et Philippe Soulier qui pendant plus de 30 ans ont fait fonctionner la boulangerie-épicerie du Viala du Tarn (cf. Le Progrès Saint-Affricain du jeudi 9 janvier 2020) et ont pris leur retraite le 31 décembre 2019.
Cette association a été créée en décembre par des habitantes et habitants du village qui étaient déjà partie prenante de la vie associative vialaraine.
Une clientèle satisfaite
Depuis le succès ne s’est pas démenti. 140 personnes (soit plus d’un quart de la population de la commune) ont adhéré au Dépanneur et une trentaine de bénévoles se relayent depuis le début pour aller chercher le pain et la presse, tenir les permanences, gérer l’approvisionnement, réaliser les aménagements nécessaires, assurer le nettoyage et le respect des règles d’hygiène, travailler sur la comptabilité… Dans tous ces domaines, chacun-e s’efforce d’apporter ses compétences. Et ça marche !
L’association bénéficie également du soutien de la mairie.
Tous les jours, ce sont entre 50 à 80 personnes qui viennent y faire leurs courses. Outre le pain et les journaux, elles peuvent compter sur plus de 350 références d’articles d’épicerie avec une proportion significative issue de la production locale.
Dans le contexte de sécurité sanitaire et de confinement de la population, la vie du village est comme partout en France bouleversée. C’est si vrai que Le Dépanneur reste le dernier commerce du village ouvert. On mesure ainsi ce qu’on aurait perdu si l’épicerie avait dû fermer le 31 décembre dernier. On se rappelle qu’une telle perspective se profilait alors car ni Marie-O et Philippe, ni la mairie n’avaient réussi à trouver des repreneurs malgré leurs efforts dans ce sens.
Tenir ses engagements et s’adapter
Après plus de 3 mois d’activité, on peut dire que Le Dépanneur a largement tenu ses engagements de poursuivre l’activité et de la développer.
Cela est d’abord dû au fait qu’une part importante des habitant-e-s du village a fait le choix d’accorder sa confiance à l’association. On peut même dire que cette confiance s’est affirmée nettement depuis le début du confinement de la population. En témoigne une affluence en augmentation d’une clientèle qui préfère éviter les concentrations de public dans les grandes surfaces et qui vient d’autant plus au Dépanneur qu’elle y trouve pratiquement tous les articles essentiels dont elle a besoin. Cela s’explique aussi du fait que plusieurs personnes habitant en ville ont fait le choix de se confiner au Viala. Si au départ certain-e-s habitant-e-s ont jugé négativement ces arrivées car ils craignaient une propagation du virus, cette méfiance s’est heureusement dissipée.
Ce succès est aussi et surtout lié à l’implication des bénévoles et du collectif d’animation du Dépanneur pour prendre en charge et coordonner les différentes tâches au quotidien.
Ce quotidien, parlons-en car il n’a rien d’évident.
Il a fallu d’abord s’adapter à la situation créée par cette crise sanitaire d’ampleur mondiale. Cela passe par une sensibilisation aux gestes barrière. Désormais une seule personne peut entrer dans l’épicerie en tenant compte des marquages au sol. Les autres attendent leur tour en respectant les distances de rigueur. Un ou une bénévole la sert, l’autre s’occupe de la caisse. Le collectif a encouragé la formation de binômes de bénévoles fixes pour limiter les risques.
Il y a du gel hydro-alcoolique pour la clientèle et bien sûr pour les bénévoles. Le Dépanneur n’avait pas de réserves et suite à une demande de sa part, la mairie lui en a fourni récemment. Les bénévoles disposent également de masques.
Il a fallu par ailleurs revoir les horaires. Cela était nécessaire pour assurer toutes les tâches, respecter le principe de précaution en ne mettant pas à contribution les bénévoles les plus âgé-e-s pour les permanences et l’approvisionnement, et d’une manière générale ménager les efforts de chacun-e.
Désormais l’épicerie est ouverte de 8h à 13h du mardi au dimanche et de 17h à 19h le mercredi et le samedi.
Les réunions du collectif qui coordonne la gestion de l’épicerie ont pris la forme de conférences téléphoniques hebdomadaires pour pouvoir assumer toutes les tâches et coordonner l’activité des bénévoles.
Bien-vivre et petits plaisirs
Si l’aventure du Dépanneur force le respect, on est en droit de se poser la question : Qu’est-ce qui fait courir tou-te-s ces bénévoles ?
En fait le nom de l’association peut sembler un peu paradoxal. Certes celle-ci veut permettre à la population du village d’accéder à des produits de base essentiels mais une observation même rapide des rayons montre qu’il n’y a pas que cela. Il y a aussi une volonté d’assurer les conditions du bien-vivre. En témoigne l’importance accordée aux productions locales de qualité (légumes, fromages, charcuterie, confitures, miel, boissons, infusions, savons), souvent bio et qui doivent rester à un prix accessible grâce à des marges faibles (10 %) en cohérence avec la démarche du Dépanneur d’assumer une activité de service sans but lucratif.
Les petits plaisirs qu’elles procurent sont importants, surtout dans le contexte anxiogène actuel.
Les bénévoles de l’association tiennent les permanences de l’épicerie, mais aussi participent aux commissions (approvisionnement, comptabilité, aménagement, communication, hygiène…) et plus largement contribuent au lien social et territorial ainsi qu’à la solidarité que Le Dépanneur veut développer à l’échelle du village.
En ce temps de confinement, l’épicerie est le seul endroit où il est possible de se rencontrer même s’il faut respecter les distances de rigueur. C’est un moment rare et apprécié de vie sociale. On vient y faire ses achats, mais on y exprime aussi ses inquiétudes comme ses espoirs, on y échange des sourires et y puise des encouragements de même que de la bienveillance dont on a grandement besoin. On y prend et on donne des nouvelles des uns, des unes et des autres.
Celles et ceux qui n’ont pas d’imprimante peuvent y trouver des exemplaires d’attestation de sortie.
Le lien social et territorial comme la solidarité valent pour les habitant-e-s mais aussi tout particulièrement pour les producteurs et productrices du village et des environs. Avec la fermeture des marchés, il leur faut réorganiser leurs circuits de vente.
Ainsi la semaine dernière une productrice de fromage de chèvre bio à appelé car elle se demandait comment elle allait écouler son stock de plus en plus volumineux. Le fait que le Dépanneur en ait acheté 40 (tous vendus en deux jours) a alors été particulièrement apprécié. On pourrait citer d’autres exemples.
Tout cela dessine une vision ouverte et accueillante de la vie de village qui a pour but de donner envie de vivre, d’habiter, et, qui sait ? de s’installer au Viala-du-Tarn.
La force du collectif
Cela est motif à satisfaction mais ce qui donne de l’énergie aux dépanneuses et dépanneurs, c’est aussi la conscience de former un véritable collectif sans lequel rien ne serait possible.
Cette dimension a pu au début intriguer voire dérouter car on nous a toujours dit et appris qu’un commerce est une entreprise dont le gérant est le seul maître à bord en insistant sur le fait que hors de cela point de salut !
Pourtant on voit bien qu’il est possible de fonctionner différemment et que le collectif, s’il demande plus de temps (concertation, organisation) permet d’aller plus loin et d’ouvrir le champ des possibles, ce qui n’est pas son moindre mérite.
C’est surtout cela qui permet de penser à l’avenir et notamment à la vie de l’après-confinement.
Les dépanneurs et dépanneuses rêvent de pouvoir accueillir dès cet été un marché de productrices et producteurs locaux devant l’épicerie. Des locaux plus grands permettant de mieux accueillir la clientèle font aussi partie de leurs projets. Les idées dans tous les domaines ne manquent pas. On se dit alors que leur réalisation dépendra de la dynamique créée dans le village par une association qui veut continuer à s’ouvrir pour accueillir de nouveaux membres et surtout des bénévoles supplémentaires !
Le Dépanneur, Le Bourg, Viala-du-Tarn, 05 65 62 50 55
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