Les 30 ans du Roucous - Parution Midi Libre du 07/06/2022
Dans le Sud-Aveyron, un lieu de vie et d’accueil pas si utopique que cela au Viala-du-Tarn
Le Roucous a 30 ans… et quelque. Enfin célébrée, la fête a permis de retrouver cette qualité de travail dans l’accompagnement, ce fonctionnement en autogestion à préserver.
Près de 250 personnes venues de toute la France, mais aussi du Viala-du-Tarn et de ses environs, ont participé aux 30 ans du lieu de vie et d’accueil. Cette triple décennie d’activité, le Roucous avait prévu de la fêter en 2020, mais le Covid-19 et les mesures de sécurité sanitaire en ont décidé autrement.
Et en 2021, il a également fallu y renoncer pour les mêmes raisons. Qu’à cela ne tienne ! Les permanentes et permanents ainsi que l’association gérant ce Lieu de vie et d’accueil (LVA) emblématique, dont la qualité du travail d’accompagnement est largement reconnue, ont décidé que ce trentième anniversaire serait célébré. C’est chose faite parce que le Roucous, c’est aussi et d’abord aller au bout de ses rêves et, pour cela, ne pas suivre de chemin tout tracé.
En son sein, une jeune équipe, composée actuellement d’Audrey Boutin, Arnaud Touvet, Solange Rigondaud et Pierre Gnidine, travaille sur le lieu (trois membres y vivent en permanence) et accompagne à l’année des mineurs et jeunes majeurs en situation de handicap. D’autres jeunes y sont accueillis de courtes périodes dites "séjours de rupture" ou y résident en alternance.
Les quatre permanentes et permanents ainsi que l’association font fonctionner le lieu en autogestion. Pas de chef, pas de hiérarchie des salaires et surtout pas de spécialisation. Chaque membre de l’équipe assume les différentes tâches du lieu et se forme au besoin en vue de les mettre en œuvre.
Pratique artisanale du travail social
Dans un contexte où les politiques publiques s’efforcent d’imposer les méthodes de l’entreprise et singulièrement de la grande industrie (rentabilité, division du travail, renforcement des hiérarchies, évaluation permanente, omniprésence du numérique au détriment d’effectifs suffisants en personnel) au secteur sanitaire et social, l’équipe du Roucous se réclame d’une pratique artisanale centrée sur les personnes accueillies. Chaque prise en charge est liée à un projet personnel d’accompagnement adapté.
Pour Barbara Detailleur, éducatrice spécialisée qui a travaillé durant huit ans au Roucous, "il est important de résister à l’industrialisation qui menace aussi les lieux de vies et d’accueil" et de préciser que "leur indépendance est actuellement en jeu". Elle insiste également sur l’importance du travail avec les partenaires institutionnels et principalement l’Aide sociale à l’enfance (ASE).
Un lieu au cœur d’un réseau
Toute l’équipe du Roucous a bien conscience que les LVA sont à la croisée des chemins et que cette résistance n’a de sens que si elle s’inscrit dans une réflexion collective et un travail de réseau.
Ces dernières années, elle a pu s’appuyer sur tous les liens tissés depuis la fondation du lieu en les développant patiemment. Ainsi, le collège de l’association qui administre le lieu s’est renouvelé et en partie rajeuni en accueillant de nouveaux membres. Le Roucous est plus actif que jamais dans le Groupe d’échange et de recherche pour la pratique en lieu d’accueil (Gerpla) qui fédère une quarantaine de LVA dans toute la France.
Au Viala-du-Tarn, il participe à la vie associative locale en fournissant des bénévoles au Dépanneur, l’épicerie associative et autogérée du village, ou à travers les activités culturelles du Foyer d’éducation populaire. Ainsi, son point accueil jeunesse, qui permet de recevoir des groupes extérieurs, héberge chaque été pendant une semaine des jeunes qui participent avec d’autres du LVA à un stage de cirque.
On retrouve également plusieurs de ses membres dans la fanfare locale, les Georges du Tarn, qui a joué récemment pour le plus grand bonheur du public. Plus largement, il accueille à plusieurs moments de l’année concerts et autres spectacles qui contribuent à la vie de la commune et de ses environs. Du reste, la pratique artistique est au cœur du projet d’accueil et de vie du lieu. Enfin, un des jeunes accueillis est scolarisé dans l’école du Viala et participe même au maintien de l’établissement scolaire.
Si le LVA du Roucous peut sembler isolé géographiquement, il ne cultive pas l’autarcie pour autant, mais constitue un exemple réussi de socialisation et d’inclusion. Il permet de donner une place dans la société à des enfants longtemps stigmatisés comme "incasables" et propose une véritable alternative éducative et sociale. On entend souvent dire que Le Roucous est un petit morceau d’utopie. C’est vrai et c'est peut-être là que sa force réside, justement dans le fait que cette utopie soit une réalité observable et tangible.
Ces Lieux de vie et d’accueil expliqués
Au nombre de 450 dans toute la France, les Lieux de vie et d’accueil ne représentent que 1 % des structures d’accueil et d’accompagnement social et thérapeutique.
Jean-Luc Minart, formateur dans le secteur social, membre du collège de l’association Le Roucous et habitant du Viala leur a consacré un ouvrage (publié en 2013) qui permet de mieux connaître leur histoire, les courants d’idées qui les ont influencés, leurs pratiques et les défis auxquels ils doivent faire face aujourd’hui.
Jean-Luc Minart : Lieux de vie et d’accueil. Réhabiliter l’utopie, aux éditions Erès
Nunu ou la mémoire vive du Roucous
Nunu, retraité actif et toujours présent au Roucous.
Sa silhouette ne passe pas inaperçue. Malgré le poids de l’âge et des épreuves, Didier Nuez, que tout le monde appelle Nunu, en impose par sa corpulence, ses cheveux longs et sa moustache fournie. Issu d’un milieu modeste, il a grandi à Tournemire et fait ses études secondaires à Saint-Affrique.
On le retrouve dans les années 1970 aux côtés des paysans dans la lutte contre l’extension du camp militaire du Larzac où germent les idées d’autogestion, d’écologie, de liberté et de solidarité qui forgent les valeurs du Roucous. Même s’il a un temps travaillé dans l’industrie fromagère, il s’oriente vers le secteur social et éducatif.
En 1989, il est contacté par le maire du Viala-du-Tarn qui l’informe qu’un terrain en vente pourrait l’intéresser alors qu’il cherche à créer un lieu de vie et d’accueil avec celle qui était alors sa compagne, Dominique Haustrate. Tous les deux finissent par trouver une ferme désaffectée.
Après des travaux de rénovation et les aménagements nécessaires, le Roucous peut démarrer son activité. Les enfants accueillis y grandissent et s’y épanouissent. Plusieurs ont gardé le contact avec ce lieu qui les a vus renaître et participaient à la fête de ses 30 ans. Il faut toutefois attendre 2004 pour que le lieu soit viable et que l’équipe de permanentes et permanents puisse se verser un Smic.
L’histoire du Roucous n’a pas toujours été un long fleuve tranquille. « Il a fallu parfois contourner les règles » pour se faire une place, aime à rappeler Nunu, notamment jusqu’à la loi de 2002 qui a reconnu les LVA. Pendant les quatre jours de rencontre et de festivité, Nunu a pu mesurer l’ampleur du travail accompli, le sien et celui de toutes celles et ceux qui ont œuvré pour le Roucous.
Après 25 années, de travail sur le lieu, il s’est retiré dans la maison qu’il a construite entre autres avec sa compagne, Manou Loussouarn, décédée en décembre dernier. Elle aussi a marqué ce lieu et toutes celles et ceux qui l’ont connue avaient une pensée pour elle en venant fêter les 30 ans du Roucous. Transmettre, faire du lien, agir pour faire vivre sa commune et la rendre accueillante, œuvrer pour un monde libre, égalitaire et solidaire, c’est ce qui anime profondément ce libertaire de cœur et de raison.
Les Georges du Tarn ont enflammé la scène du Roucous.
Un point de ralliement parmi d’autres ?
Le site du Roucous a vécu pendant quatre jours dans une ambiance de festival. Chapiteau, stand d’accueil, bar, cantine, réfectoire sous grand barnum, aire de camping, parking dans un champ immense, tout y était.
70 bénévoles ont œuvré tout au long des quatre jours pour assurer le succès d’un double événement que l’association Le Roucous préparait depuis un an. La fête a tenu ses promesses avec ses concerts, sketches, happenings, projections de films, et l’exposition de photos proposant aux regards des tranches de vie du Roucous depuis ses débuts.
Elles étaient disséminées dans la châtaigneraie du lieu où le public était invité à se perdre. Le lieu a également accueilli les rencontres nationales annuelles du Groupe d’échange et de recherche pour la pratique en lieu d’accueil (Gerpla) qui fédère une cinquantaine de Lieux de vie et d’accueil (LVA) répartis dans toute la France.
Le Gerpla mutualise l’information, apporte un soutien juridique à ses membres et impulse une réflexion sur les pratiques des LVA sans oublier le monde qui les entoure. Il s’adresse également aux porteuses et porteurs de projets de LVA venus en nombre au Roucous et auxquels toute la première journée était consacrée.
Les questions pratiques de fonctionnement accaparent une grande partie de l’énergie des équipes des LVA aussi, tout en essayant de répondre à leurs préoccupations, ces rencontres s’efforcent de mettre au centre de leur réflexion les publics accueillis et les questionnements sur leur place dans la société.
Résister à l’uniformisation
Le thème de cette année “LVA, des pratiques artisanales dans un monde en dérive industrielle” invitait à la vigilance et à la résistance. Son ambition : outiller les équipes soucieuses de ne pas se faire happer par des normes et des cadres réglementaires qui ont tendance à standardiser le soin et l’accompagnement social au risque de le déshumaniser.
Face aux écueils de l’uniformisation et de la perte du sens, le Roucous comme le Gerpla se pensent comme des ateliers de l’utopie et rêvent d’être des points de ralliement parmi d’autres
LAURENT SADOCK
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